Texte de Monsieur Albert Hubert, président national de la Fraternelle des Chasseurs Ardennais, paru dans la revue du 2e trimestre 1966.

Le Colonel Hre Jean Militis
ancien Député
Chasseur Ardennais d'honneur…

Quand le major Jean Militis avait accepté d'être présent à l'assemblée générale de notre Fraternelle, qui se déroulait dans sa Gaume natale, il ne se doutait pas de la surprise que lui réservait le président. La proposition de l'élever à la dignité de membre d'honneur de la Fraternelle des Chasseurs Ardennais - ou mieux, de Chasseur Ardennais d'honneur - fut ratifiée par des acclamations enthousiastes. Et c'est ainsi que nous avons eu le plaisir de lui remettre un béret vert différent de celui qu'il porte, avec intrépidité, depuis quelque vingt ans.
Jean Militis est vraiment un homme, un militaire d'exception, qui eût peut-être dû vivre à l'époque des Bayard et des du Guesclin. Ce serait cependant risquer de le vexer un peu que d'écrire que son épopée tient en quelque sorte de la légende, car nul n'est plus solidement planté sur terre, même s'il vogue bien souvent entre ciel et terre.
Gaumais passionné, il est né à Sainte-Marie-sur-Semois en 1922 et il eût certainement appartenu aux Chasseurs Ardennais s'il avait compté quelques années de plus. Cette erreur est aujourd'hui réparée : il est Chasseur Ardennais, et il en est heureux et fier.
Jean Militis Dès 1941, à moins de vingt ans, il se lançait à corps perdu dans la résistance : ligne de passage de prisonniers et de résistants, services de renseignements, préparation de terrains de parachutage, résistance armée. Nous qui avions suivi et admiré ses activités, nous n'avons pas été trop surpris de le voir, à la libération, alors que nous sortions de longs mois de détention, officier auxiliaire, adjoint au Commandant du secteur 7 de la Zone V de l'Armée Secrète, qui couvrait tout le Sud-Luxembourg d'Arlon à Bouillon, en passant par Virton, Habay-la-Neuve, Chiny, Florenville, Herbeumont. Il se distinguait par son calme, son allure décidée, au point d'en remontrer à de vieux briscards.
Tenaillé par le besoin de l'action, il s'engagea dans un escadron de reconnaissance de l'Armée américaine afin de participer aux derniers assauts contre la Ligne Siegfried et les armées hitlériennes. Il encourut plusieurs blessures, heureusement légères, et combattit ainsi jusqu'en Tchécoslovaquie.
Il était déjà titulaire de la Croix de guerre et de diverses autres distinctions quand il entra en 1945 à l'Ecole d'Infanterie, établie alors à Tervueren, et où il eut comme instructeur le futur colonel Remience. En 1946, il s'engagea aux Commandos, puis devint parachutiste. Il fut évidemment un des premiers à partir pour la Corée où il commandait une compagnie, se distinguant à diverses reprises sur des pitons encerclés.
Par la suite, il passa au Congo, avec une unité de paracommandos et se signala par certaines expériences audacieuses de survie dans les brousses de notre ex-colonie et de la Guinée. De 1958 à 1964, le major Militis fut chef de corps du centre d'entraînement des paracommandos de Marche-les-Dames.
Bien sûr, on eut à nouveau besoin de lui au Congo en 1959 et en 1960. En janvier 1965, il fut chargé du perfectionnement du cadre de réserve - pouvait-on mettre à meilleure école les officiers de réserve désireux de devenir des militaires rompus aux exigences de la guerre moderne? - avant de devenir, voici quelques mois, attaché au cabinet du nouveau ministre de la Défense nationale, M. Charles Poswick, qu'il … forma aux Commandos.
N'imaginez pas que le major Militis soit un baroudeur d'instinct. C'est, au contraire, un solide gaillard, sensible, généreux, fort cultivé, doué de l'humour méridional des gens de Gaume, empressé à rendre service, mais aussi soldat dans l'acception la plus complète de ce terme. Il fait honneur à la Gaume et au Luxembourg.
Les Chasseurs Ardennais sont extrêmement honorés de le compter désormais parmi eux.
Albert Hubert

PS: En 1962, Jean Militis profita de ses fonctions à Marche-les-Dames pour organiser un camp pour jeunes délinquants profonds. En 1963, il fit de même pour une centaine de jeunes filles atteintes de la polio. C'est en 1966 que débute vraiment son organisation systématique de camps pour handicapés. Depuis cette date, c'est devenu "sa vie" et il peut totaliser 110 camps pour 2000 handicapés, soit une moyenne de trois camps par an.
Fondateur de l'ASBL "Vacances handicapés", vivant exclusivement de dons privés, dont le produit de ses propres livres, Jean Militis peut se souvenir de camps de vacances en Corse (neuf endroits), en France (Var, Haute Savoie, Bretagne, Ardèche, Vendée, Tarn, Pyrénées et Bouches du Rhône), en Italie (cinq endroits), en Espagne (Malaga et Estepona) et au Maroc (Immouzer du Candar et Fès). C'est "ça" dit-il modestement, mon vrai palmarès.
Jean Militis est décédé à Arlon le 17 septembre 2006.

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